Bonjour à vous qui, dans le maelström du net, êtes arrivés, par hasard? lassitude? erreur? sur ce blog. Vous êtes les bienvenus. Vous y lirez des extraits d'articles, de pensées, d'interviews, piochés ça et là, et illustrés de photos et dessins détournés, via un humour de bon aloi. Vous pouvez évidemment réagir avec le même humour, la même ironie que nous mettons, chaque jour, à tenter de respirer un peu plus librement dans une société qui se corsète chaque fois un peu plus.

mercredi 20 juin 2012

"Ce petit homme contrefait prêtait à rire, mais pas l'arme qu'il brandissait". Benoît Barvin in "Pensées à petits pas"

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Pensées pour nous-mêmes:


(TON VIS-A-VIS TE VOIT
TEL QUE TU LE REGARDES)


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COURTS RÉCITS AU LONG COURS(26)
pcc Benoît Barvin


Santé

   Elle me surprit, cette vieille femme, à la sortie du supermarché. Elle trébucha et, au ralenti, je vis le moment où elle allait tomber lourdement sur le sol, se briser une jambe, ou le fémur, ou le crâne, ou... Je l'attrapai au vol, réussis à la maintenir en suspension, dans l'air frais du magasin, malheureusement adepte de la climatisation à outrance, celle qui vous plaque sur la poitrine une langue glacée vous conduisant, tout droit, chez le médecin pour fluxion de poitrine carabinée et...
   Je stoppai mon bavardage intérieur (conséquence des redondantes conversations de la Maison de Retraite où je travaillais) en réussissant à rétablir l'équilibre de l'ancêtre. Elle était à présent sur ses jambes, flageolante, le visage d'un blanc de craie, la respiration sifflante. Cependant, dans son début de chute, elle n'avait pas lâché son sac de courses. Elle s'y cramponnait comme s'il s'agissait d'un trésor aztèque récupéré après moult péripéties, imaginées par un duo de cinéastes US roublards.
   Autour de nous, l'évènement prenait une tournure des plus fait-diverse... oserai-je dire. Deux autres vieilles entouraient leur aînée, si j'en croyais les commentaires où il était question de l'âge de la victime, de la pâleur de craie de son visage "ridé" (du moins est-ce que j'ai cru entendre). Un vieil homme portant à la fois une barbe impeccable et un ventre proéminent, les joues rubicondes, les deux mains crochetant chacune un pack de bières,  demanda si La p'tite dame allait bien..
   La caissière - une grosse entre deux âges, mal fringuée dans un costume maison qui lui boudinait une poitrine gargantuesque et peu appétissante - ânonnait "vous l'avez échappé belle... Heureusement que Monsieur était là... Vous devriez faire attention... A votre âge, hein?... C'est triste, de vieillir seule...", à moins que ce ne fussent les différents commentaires qui, pareillement misérabilistes, jouaient en canon dans une symphonie des plus pathétiques...
   "Ne vous inquiétez, Madame, dis-je tout haut. Je vais vous accompagner jusqu'à chez vous. Vous habitez tout près, je suppose...". La vieille bredouilla une adresse en jetant autour d'elle des regards perdus. Un vigile s'approcha, vaste morceau de barbaque mal entretenue et, posant sa large main sombre sur mon épaule, me fit sursauter: "Besoin d'un coup de mains?". 
  Je fis non de la tête, envoyai à chacun mon sourire charmeur et hypnotique et, glissant un bras sous celui de la vieille, après m'être emparé de son sac, je nous dirigeai habilement en direction de la sortie.
   Je savais où habitait la femme. Je la surveillais depuis longtemps. Elle ne me connaissait pas, puisqu'elle m'avait abandonné à ma naissance. J'avais mis un sacré temps pour  la retrouver.
   Maintenant, elle allait payer pour ce qu'elle avait fait, vingt-huit ans plus tôt. Je m'étais soigneusement préparé pour la circonstance. Dans mon sac à dos reposaient benoîtement une corde, un coutelas, une pince coupante, un flacon d'éther et de la résine de cannabis, pour tenir le coup.
   Maman regretterait plusieurs jours de ne pas s'être réellement cassé quelque chose dans sa chute... 


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Sophie Milman. Ces Petits Riens.



Une jolie voix mais peut-être un peu trop de maniérisme
dans l'environnement musical.


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Stacey Kent- Ces Petits Riens.



Ma préférée, chantée avec un coeur tendre et légèrement saignant. 
Un beau moment de tendresse.

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San Francisco - Angelique Kidjo - ces petits riens


Une autre interprétation agréable et romantique


 Ces Petits Riens
(Serge Gainsbourg):

Mieux vaut n'penser à rien
Que n'pas penser du tout
Rien c'est déjà
Rien c'est déjà beaucoup
On se souvient de rien
Et puisqu'on oublie tout
Rien c'est bien mieux
Rien c'est bien mieux que tout

Mieux vaut n'penser à rien
Que de penser à vous
Ça ne me vaut rien
Ça ne me vaut rien du tout
Comme si de rien
N'était je pense à tous
Ces petits riens
Qui me venaient de vous

Si c'était trois fois rien
Trois fois rien entre nous
Evidemment
Cà ne fait pas beaucoup
Ce sont ces petits riens
Que j'ai mis bout à bout
Ces petits riens
Qui me venaient de vous

Mieux vaut pleurer de rien
Que de rire de tout
Pleurer pour un rien
C'est déjà beaucoup
Mais vous vous n'avez rien
Dans le cœur et j'avoue
Je vous envie
Je vous en veux beaucoup

Ce sont ces petits riens
Qui me venaient de vous
Les voulez-vous ?
Tenez ! Que voulez-vous ?
Moi je ne veux pour rien
Au monde plus rien de vous
Pour être à vous
Faut être à moitié fou.

sur http://www.parolesmania.com/ ] 

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Nadine Estrella

2 commentaires:

Minéraline a dit…

Oh que ce récit court est incisif.
Merci de nous le faire partager, à un moment, j'ai plutôt cru que la vieille dame allait "ameuter" la foule en disant que le narrateur voulait lui voler son sac.
Bien joué !
Bonne soirée.

Minéraline

Benoît Barvin, Blanche Baptiste, Luc Desle, Jacques Damboise, Nadine Estrella a dit…

Votre plaisir est le nôtre! Benoît Barvin cherche à surprendre ses lectrices et lecteurs en tentant de ne pas trop en faire... Si nous en croyons votre réaction, il a réussi, pour cette fois... Merci à vous et continuez à nous lire - le mercredi et le dimanche, Benoît continue à sévir!