Bonjour à vous qui, dans le maelström du net, êtes arrivés, par hasard? lassitude? erreur? sur ce blog. Vous êtes les bienvenus. Vous y lirez des extraits d'articles, de pensées, d'interviews, piochés ça et là, et illustrés de photos et dessins détournés, via un humour de bon aloi. Vous pouvez évidemment réagir avec le même humour, la même ironie que nous mettons, chaque jour, à tenter de respirer un peu plus librement dans une société qui se corsète chaque fois un peu plus.

mercredi 10 avril 2013

"Ce tueur en série avait une superbe collection de doudous d'horreur". Benoît Barvin in "Pensées pensées".

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Pensées pour nous-mêmes:

(AVANCE A TON RYTHME,
TU ES DANS LES BONNES GRÂCES DU TEMPS)

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COURTS RÉCITS AU LONG COURS (84)
pcc Benoît Barvin

Faust Disappears with Mephistopheles, Faust,
illustrated by Willy Pogany


Mémoires

   J'étais devant ce couple, tremblant, sous un porche d'hôtel, je crois. L'homme portait des lunettes rondes, avait l'air harassé et elle, petite poupée extrême-orientale,  elle hésitait à me sourire et... Oh Mon Dieu! Voilà que je sortais une arme de ma poche, un revolver .38 Special, et que j'en vidais le barillet sur l'homme qui s'effondrait... La femme se mettait à hurler, je tremblais encore plus, je n'étais qu'un immense tremblement mais, en même temps, j'étais délivré de quelque chose. Mais de quoi et...

   Je me "réveillai" soudain de ce terrible cauchemar. Plus de meurtre, plus de John Lennon, de Mark David Chapman, plus de cet air vicié New-Yorkais et de ce terrible froid de décembre... Cette fois, j'étais vêtu d'une toge, je m'en rendis compte puisque je trébuchai plusieurs fois en marchant... Non, plutôt en trottinant vers un groupe, là-bas, dissimulé sous un immense escalier. Je vis briller l'acier de poignards, je crois... et les conjurés attendaient, fébriles, visage fermé, pupilles de chats qui guettent leur proie et...

   La "proie" descendait l'escalier après s'être séparé d'un de ses pairs. Un homme aux traits durcis par l'habitude de commander. Un homme haï par ces conjurés qui se précipitent pour l'assassiner, qui lui portent chacun un coup de leur arme... La toge blanche s'éclabousse de sang... Je suis le dernier à enfoncer la lame quelque part dans ce corps déjà en partie exsangue... Mais l'homme a les yeux soudain rivés vers moi et il me dit, d'une voix hachée... Il me dit... "Tu quoque...", le tout se perd dans d'horribles borborygmes...

   Me voilà de nouveau jaillissant de de ce rêve effroyable. Il fait nuit noire dans ma chambre. Mais quelle chambre, déjà? Et qui suis-je vraiment? Mes idées s'entrechoquent. Mon corps est douloureux, comme à l'habitude et... Mes paupières sont aussi pesantes que du plomb. Je rejoins un nouveau "rêve"... Je suis allongé sur le capot arrière d'une voiture américaine. Devant moi, ce qui reste d'un homme, la tête à moitié arrachée, dégoulinante de sang et d'humeurs visqueuses... A ma gauche, une femme, encore jolie malgré ses traits déformés par l'horreur, tente de ramener des morceaux gélatineux que j'identifie aussitôt comme étant de la cervelle... De la cervelle humaine... Pas besoin d'être grand clerc pour comprendre où je me trouve et avec qui.

   Je me secoue. Je hurle. Je déteste toute cette violence. Je suis sûr que je n'y ai jamais participé, qu'il ne s'agit que de résidus d'une mémoire nourrie au goulot pervers de la télévision, de revues cyniques, de livres écrits par des malades mentaux qui... Mais, déjà, me voilà reparti dans les limbes du temps. Je pourrais croire qu'il s'agit d'un mieux, si je ne m'enfonçais pas, à nouveau, dans toutes les époques, sur tous les continents...

   Meurtres, assassinats, guerres, violences en tous genres me saturent la mémoire, me la polluent, me terrassent enfin et voilà que je réclame grâce. "Oh Vous qui Etes à la source de toutes choses", me mets-je à ânonner, moi qui n'ai jamais cru en rien, "Faites cesser tout ça"... Mais ce "tout ça" persiste à me submerger. Cette fois, j'ai droit à des faits mineurs: un homme qui me met plus bas que terre, devant mes collègues; un flic qui me poursuit de sa vindicte car j'ai noté trop durement sa fille; un redressement fiscal injustifié suivi d'un long passage à Pôle Emploi...

   Je m'enfonce, je le sens bien. La chambre est toujours badigeonnée au noir de suie. Une odeur fade agresse mes narines - un corps refroidi? j'ai un terrible mal au coeur et mes jambes semblent enfler peu à peu... Parfois je plonge dans un nouveau cauchemar qui alterne scènes historiques et celles du quotidien... L'évidence alors me foudroie,  une vérité que je repoussais depuis la nuit des temps: j'ai cessé de vivre...

   "A-t-il souffert?" interroge la voix déformée de tristesse de ma compagne . "La dose de cachets qu'il a ingérée a dû produire un effet assez rapide", répond une voix d'homme, celle d'un médecin urgentiste, je suppose. Quelque part, des sanglots... Il me semble que les voix s'éloignent peu à peu. Je me retrouve, voguant sur l'océan du temps... Parfois des images m'assaillent... Moi qui étais un excellent professeur d'histoire, je devrais être heureux de vivre en direct les événements que je décrivais, avec force détail, à mes élèves pendus à mes lèvres... 

   Mais je ne suis pas heureux. Je n'ai pas mal non plus. Je suis simplement terrifié à l'idée que ma "vie", à présent, risque de ressembler à ces cauchemars perpétuels, absurdes, à ces tournoiements dans l'histoire des hommes... Une histoire faite de "bruits et de fureur". Surtout de fureur, de terreur, de massacres, de...

   Je sais à présent ce qu'il y a derrière chacune de nos vies. Et quand une voix - celle de mon épouse, brisée de chagrin, émet ce voeu: "j'espère au moins qu'il est plus heureux là où il est", je hurle un "NON" dérisoire... 

   Un Non auquel les âmes de toutes celles et tous ceux qui s'approchent répondent par des ricanements désespérés...


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(Dans cette assemblée de décideurs mondiaux, 
le sérieux le disputait avec le... heu... Le..."


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(La crise du logement n'était pas un vain mot)

Natalia Vodianova est Alice au Pays des Merveilles

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(Plus âgée, Alice était un rien... coquine)



"Hou, hou, gentils traders... 
J'ai quelque chose à vous montrer..."

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(Alice au pays des Vermeilles nous la jouait
tueuse en série)


Alice Madness Returns Artwork  Troisème Trailer pour Alice : Madness ...
eklecty-city.fr

"Y'a un banquier dans la salle?"

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Blanche Baptiste

2 commentaires:

Castor tillon a dit…

Mémoires

Très jolie nouvelle, Benoît.

La Alice psychopathe (oui oui, celle-là, la jolie brune au regard charbonneux et au couteau ensanglanté) est mon image de fond d'écran depuis plusieurs mois.

Benoît Barvin, Blanche Baptiste, Luc Desle, Jacques Damboise, Nadine Estrella a dit…

Comme quoi, cher Castor, les grands z'esprits se rencontrent... Merci pour l'appréciation concernant la nouvelle...