Bonjour à vous qui, dans le maelström du net, êtes arrivés, par hasard? lassitude? erreur? sur ce blog. Vous êtes les bienvenus. Vous y lirez des extraits d'articles, de pensées, d'interviews, piochés ça et là, et illustrés de photos et dessins détournés, via un humour de bon aloi. Vous pouvez évidemment réagir avec le même humour, la même ironie que nous mettons, chaque jour, à tenter de respirer un peu plus librement dans une société qui se corsète chaque fois un peu plus.

jeudi 5 décembre 2013

"Son haleine était un éthylotest positif permanent". Benoît Barvin in "Pensées pensées".

$$$
Pensées pour nous-mêmes:

(LE BONHEUR DE L’ÂME
EST COMME LE VENT SUR TON VISAGE)

$$$

(Foule en extase en voyant enfin 
des trains partant à l'heure)


Higbee’s window display, Margaret Bourke-White, 
Cleveland, Ohio, 1934


$$$

(Pancartes de référendum indiquant la direction à suivre)


jegoun.net

Le "référendum d'initiative partagée":
une avancée démocratique?

Béligh Nabli
Enseignant à Sciences Po
et directeur de recherche à l'IRIS


   (...) Face au spectre d'une "démocratie sans le peuple" (Maurice Duverger) -où les représentants décident seuls des affaires publiques- l'avenir du modèle démocratique réside au-delà du seul jeu de la compétition électorale. Dans cette optique, l'exploration de la démocratie participative suppose de revisiter le traditionnel instrument référendaire. Le Général de Gaulle, véritable Père fondateur de la Ve République, estimait qu'il était impératif de donner la parole au peuple. La rédaction de l'article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 dispose ainsi, que "La Souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum".

   Alors que la période gaullienne de la Ve République est marquée par un recours "décomplexé" à cette technique de démocratie (semi-)directe, la pratique référendaire est aujourd'hui marginalisée et tombe dans une forme de désuétude. Le dernier référendum en date remonte à près d'une décennie et s'est soldé par le rejet de la "Constitution européenne".

   En ce sens, l'adoption du dispositif législatif explicitant la procédure du "référendum d'initiative partagée" (insérée par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 à l'article 11 de la Constitution) mérite notre attention. Il s'agit de la consécration d'un nouveau droit politique reconnu aux citoyens. Du moins en apparence, car derrière l'avancée potentielle de la démocratie participative, la difficulté de mise en œuvre de ce référendum hybride en fait d'emblée un droit fictif.

   Formellement, il est désormais possible d'organiser une consultation populaire sur une proposition de loi "à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement" soutenue par un dixième des électeurs". Non seulement il ne s'agit pas d'une "initiative populaire" proprement dite (comme cela existe en Suisse, en Italie, en Autriche ou dans l'Etat de Californie), mais l'"initiative partagée" consacre le primat de la volonté des parlementaires. Le déclenchement du référendum appartient en effet aux élus et non aux citoyens; ces derniers n'interviennent que dans un second temps, en soutien

   Or, pour constituer un véritable procédé de partage du (contre-)pouvoir, l'initiative de cette procédure ne devrait pas dépendre de la volonté d'un organe gouvernant ou des partis politiques. Pis, l'intervention a posteriori des citoyens laisse à penser que la "consultation du suffrage universel sembl(e) être une chose sérieuse pour la confier...aux citoyens" (Fatin-Rouge Stefanini).(...)

   (...) Le mécanisme présente une telle rigidité, il est entouré de telles précautions, que sa mise en œuvre relève de la fiction. Les seuils ou quorum sont significatifs: l'accord cumulé et combiné de 185 parlementaires et d'environ 4,5 millions de citoyens (inscrits sur les listes électorales) est nécessaire. Quand bien même la procédure serait déclenchée grâce à un double soutien démocratique (populaire et parlementaire), l'organisation du référendum n'est pas acquise. Celle-ci dépendra de l'attitude des deux assemblées: si la proposition est examinée dans le délai d'un an, le mécanisme est neutralisé.

   De surcroît, il suffit que la proposition de loi soit examinée par les deux assemblées et qu'elles rejettent le texte pour que le référendum ne soit pas organisé. En somme, le peuple n'a pas le dernier mot, puisque le recours au référendum n'est pas obligatoire. Si le texte est examiné et rejeté à la majorité des voix par le Parlement, cela risque de renforcer la défiance des citoyens envers leurs représentants, même si les parlementaires auront du mal à refuser de donner suite à une proposition appuyée par au moins 10% du corps électoral.

   À l'inverse, si le Parlement adopte la proposition, il risque de donner l'impression d'avoir cédé à la pression d'une minorité voire de groupes d'intérêt minoritaires. Du reste, l'initiative minoritaire ne saurait constituer un instrument d'action immédiate contre la majorité parlementaire, puisque les lois promulguées depuis moins d'une année ne peuvent faire l'objet de cette procédure. Cette ultime précaution vise à préserver la politique menée par le gouvernement en laissant le temps aux lois adoptées de produire leur effet et faire montre de leur intérêt.

   Complexe, restrictif, ce dispositif législatif de mise en œuvre du référendum d'initiative partagée semble voué au chapitre plus "théorique" que pratique de notre vie démocratique. La décision attendue du Conseil constitutionnel à son sujet (suite à sa saisine par le premier ministre) ne risque pas de changer son destin. (...)



$$$
(Les nouvelles maisons pour pauvres étaient un rien exiguës)

A dollhouse in a public play space, circa 1910

$$$
Luc Desle

Aucun commentaire: